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  • : Les Humeurs de Svetambre
  • : Je n'aime pas les étiquettes, les catégories, les petites cases... je m'y sens à l'étroit. J'ai l'intention de parler de bien des choses, ici ! De mes livres ou de ceux que j'ai lus, de mon travail ou de ma famille, de ce qui me fait hurler et de ce qui me fait jouir de la vie...
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  • Lucie Chenu
  • Je suis un être humain, Yeah ! et comme tout être humain, je possède trop de facettes, trop d'identités, pour les définir en moins de 250 caractères. Vous devez donc lire mes articles !
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22 janvier 2011 6 22 /01 /janvier /2011 11:34

Tous les ans au mois de janvier, les gens se souhaitent une bonne année, font des vœux pour que la nouvelle année soit moins pire que la précédente, etc. Pas les éditions du Bélial qui, par le biais de leur revue Bifrost, décernent chaque année un palmarès de « razzies » accompagnés de commentaires méprisants, blessants si possible, sous prétexte d'humour et de franchise. Alors bien sûr, les rédacteurs de l'article s'auto-dédouanent en écrivant : les Razzies se veulent subjectifs, bêtes, d'une mauvaise foi plus qu'occasionnelle et volontiers méchants. Faire sourire est leur seule ambition (en tout cas avouée). Un peu comme ces avertissements en début de roman expliquant que toute ressemblance... bla-bla-bla. Sauf que là, des noms sont cités explicitement et traînés dans la boue.

 

Et sauf que l'ambition non-avouée est de plus en plus visible. Les razzies sont orchestrés par Gilles Dumay, qui dirige la collection Lunes d'encre chez Denoël et publie, sous le nom de plume « Thomas Day », aux éditions.... du Bélial (comme c'est étrange !), et Olivier Girard, le patron du Bélial, rédac-chef de Bifrost. On sait que Lunes d'encre se porte très mal, Dumay en parle sur le blog de la collection et sur les forums, c'est même très instructif au sujet du fonctionnement des grosses boites (Denoël appartient à Gallimard). Le Bélial va très mal aussi, j'en veux pour preuve le fait que le nouveau roman de Francis Berthelot paraît chez Rivière Blanche. J'en suis ravie pour Rivière Blanche, ceci dit, et le Bélial publiera la version électronique du roman, mais pour que Girard ne publie pas actuellement la version papier comme c'était prévu, il faut que la maison d'éditions connaisse de gros soucis.

 

Ça n'est pas un secret  : l'édition se porte mal, très mal. De multiples raisons à cela.

1) Les gens lisent moins de livres (quand on compare leur prix à celui des DVD, ça n'a rien de surprenant), les types de loisirs se multiplient, il y a des tas de choses à faire, à vivre, autres que la littérature. Savoir si c'est dommage, inéluctable ou que sais-je est un autre débat.

2) L'édition numérique change la donne, mais personne ne sait réellement de quelle manière. Il reste inconfortable de lire un e-book, les gros éditeurs refusent de donner aux auteurs un pourcentage plus élevé qu'avec les livres de papier alors que les frais de distribution sont largement réduits, les drm empêchent le prêt d'un livre ou sa revente, et les e-books sont le plus souvent plus onéreux que les livres de poche  !

3) La crise financière a touché tous les secteurs, et en particulier la culture. Quand on ne sait pas si demain on aura de quoi bouffer, je ne vois pas pourquoi on achèterait des livres...

4) Dans le domaine qui nous intéresse, la SFFFF (science-fiction-fantastique-fantasy francophone), l'arrivée d'Orbit, avec une politique de management rentre-dedans (j'en veux pour preuve les multiples SP que je reçois alors que j'ai averti l'attachée de presse que, non, je ne chroniquerai pas leur production, et que d'ailleurs, la revue Faeries pour laquelle elle m'envoyait ça n'existe plus depuis des années) a balayé les « rapports de force » qui s'étaient instaurés entre les diverses maisons d'éditions.

5) Enfin, la multiplication des petites maisons d'éditions est généralement montrée du doigt par les plus gros éditeurs. En effet, ils estiment qu'un livre vendu à quelques dizaines d'exemplaires fait plus de concurrence qu'un tirage de 10 000 (cherchez l'erreur, je n'invente rien).

 

Bref, Lunes d'encre et le Bélial vont mal, et savoir cela donne un éclairage différent à la lecture des razzies.

 

Sur le forum du Bélial, on peut lire diverses réactions, dont certaines avant lecture. Et puis, j'ai pu lire ceci : Reçu mon Bifrost ce matin. Rapidement feuilleté avant d'atterrir aux razzies. Je n'ai pas souri une seule fois. Il y a dedans des choses très vrais (...)

 

Il y a aussi des mensonges éhontés qui n'ont visiblement pour but que de nuire à la concurrence... Moi, je trouve ça très flatteur, finalement, c'est une façon de dire aux petits « vous entrez dans la cour des grands », mais je comprends que d'autres réagissent mal à ce qui s'apparente à de la diffamation.

 

Alors pour que les choses soient claires auprès des lecteurs de Bifrost (parce que ses rédacteurs le savent parfaitement), Argemmios rémunère ses auteurs, collaborateurs et illustrateurs. À titre d'exemple, voilà le tarif pour les illustrations. Et en ce qui concerne la direction littéraire de Llorona on the rocks, de Charlotte Bousquet, je toucherai 2%, le tarif normal. Rien de bénévole là-dedans, ce qui ne m'empêche pas de m'éclater avec des fanzines ou webzines par ailleurs.

 

(Tout ceci pour dire qu'Argemmios aurait parfaitement pu concourir au razzie de la pire illustration, si ce n'est que les couvertures sont toutes superbes, bien sûr  ;) )

 

Je continue à relever quelques-uns des mensonges...

 

Passons sur la question de savoir si Lokomodo est un véritable éditeur... De fait, c'est un diffuseur-distributeur qui fait de l'ombre, en particulier en créant un label  : les éditions Asgard., je comprends qu'un éditeur en difficulté fasse la grimace (enfin, le jour où Asgard vendra plus qu'Orbit... ça sera champagne !)

 

Passons sur l'auto-édition de Nathalie Dau chez Argemmios, alors qu'elle publie chez Griffe d'encre (je vous conseille d'ailleurs son Contes Myalgiques II, encore plus sublime que le premier qui lui avait valu le prix Imaginales), chez Auzou (Légendes, créatures fantastiques est traduit en Espagne, en Hongrie, en Russie, au Portugal... excusez du peu) et d'autres. Il est évident que lorsqu'elle publie un de ses propres ouvrages chez Argemmios, c'est pour enrichir le catalogue. Les « pros » le savent, mais les lecteurs de la revue l'ignorent et concluent à tort qu'Argemmios a des pratiques malhonnêtes, et que c'est une maison d'éditions à éviter. D'autant plus, dit l'article, qu'elle publie de la merde (sic) pour les enfants.

 

En ce qui concerne cette nomination (aux razzies de la pire nouvelle) d'un recueil de contes pour petits enfants, je passerai sur la phrase scato-pédophile que signent les auteurs de l'article. Je comprends qu'elle ait fait tourner les sangs à Pierre Gévart, même si pour ma part je m'en contre-balance, n'ayant pas besoin de la hargne d'autrui pour me conforter dans l'idée que ce livre auquel je suis fière d'avoir participé est une réussite.

 

Passons encore sur l'hypocrisie schizophrène qui consiste à décerner un razzie aux moutons électriques pour leurs ouvrages sur les vampires (en s'auto-co-nominant pour avoir publié un numéro sur ce thème, afin de faire semblant de se donner bonne conscience). Ce que les rédacteurs de cet article oublient de préciser, c'est qu'ils ont lancé leur appel sur ce thème aussitôt après avoir, l'année précédente, attribué un razzie à Estelle Valls de Gomis pour son anthologie Vampires parue chez Glyphe, « razzie de la pire incompétence éditoriale », alors que ce bouquin est celui qui a le mieux marché et de loin de la collection. (Pour info, un « razzie de la pire incompétence éditoriale » « récompense » un plantage, comme celui de Lunes d'encre, cette année.) Ça m'avait bien fait rire à l'époque, ce razzie suivie de l'imitation, et j'avais largement relayé l'info. Et ce que les rédacteurs de l'article ne vous diront jamais, c'est que les bouquins des moutons sont nettement plus réussis et ont nettement plus de succès que leur revue, même le numéro sur le thème des vampires.

 

Passons enfin sur le passage qui m'a fait rire tant l'affirmation est ridicule : aller dire que Jeanne-A Debats s'est « lourdement inspirée » de « textes originaux » (textes qu'on se gardera bien sûr de citer) relève du plus haut comique. Et si je comprends la réaction épidermique de Jeanne, et si j'aime son franc-parler et son coup de gueule, j'avoue que je ne partage pas sa colère, tant l'idée me paraît burlesque. Stratégies du Réenchantement est un recueil (tiens, encore un excellent recueil paru chez Griffe d'encre !) tellement bon, abouti et, oui, original, que seuls ceux qui ne l'auraient pas lu pourraient croire à du plagiat.

Ah oui, mais flûte. Justement, cet article est écrit à destination de ceux qui n'ont pas encore lu ce livre, et cette phrase a pour but d'éviter qu'ils ne l'achètent...

 

Mais bon, faut pas croire, hein ! Il n'y a pas que des mensonges. Il y a aussi des trucs dont j'ignore tout (et me contre-fiche), des histoires de goûts et de couleurs (moi, je l'aime bien, la couverture de Blaguàparts), et puis des trucs totalement vrais et mérités, comme par exemple le fait que la remise du GPI2010 à Saint Malo faisait Cosette à la mer. La preuve en film.

 

Finalement, il n'y a qu'un seul passage que je trouve réellement insultant en plus d'être mensonger. C'est le fait de comparer le blog Métier éditeur avec celui de la « ligue deu ». Des amateurs passionnés par leur métier (oui, métier, même si pas vraiment alimentaire), ça n'a rien à voir avec des « professionnels » (qui, eux, gagnent des thunes) persuadant un pote de rompre un contrat, bla-blatant sur un forum au sujet d'un manuscrit reçu (citant le nom de l'auteur, quelle élégance ! quelle déontologie !) ou crachant sur les anthologies auxquelles ils ont participé, puisqu'après tout, ils ont été payés au forfait, donc se fichent éperdument que le livre se vende ou non.

 

Ah, et suggérer un razzie à Andrevon pour n'avoir pas pu se rendre à la Convention dont il était l'invité d'honneur... C'est vraiment laid. Et pas drôle.

 

Pas plus que n'est drôle (sauf à se marrer devant l'inculture) le fait de citer le roman de Musso, un auteur français, parmi les pires romans étrangers. (Ou alors, il y a une vanne que je n'ai pas comprise.)

 

Même la vanne contre le Cafard Cosmique n'est pas drôle, bien que très vraie  : un bateau à la dérive, rouillé, noyauté par un trio de blasés qui n'ont encore rien prouvé, sauf d'avoir pris trop au sérieux la formule « connard élitiste ». (Pour ceux que ce terme choquerait, c'est l'auto surnom de ce site internet et de ceux qui le fréquentent, et de fait, ça leur va fort bien.) Ça pourrait être drôle, si les rédacteurs de l'article n'avaient pas tellement contribué à faire du forum du CC ce qu'il est devenu. Du coup, ça devient pathétique.

 

Alors Olivier Girard, rédacteur en chef de Bifrost, puisque tu t'es dit prêt à publier un « droit de réponse », prends ceci pour le prochain numéro de Bifrost (en notant la véritable url du blog des éditeurs et pas le truc bidon de ton article), et envoie-moi un exemplaire justificatif.

 

Ah, non, j'oubliais : je peux m'asseoir dessus. Lorsque j'ai accepté que Bifrost publie avant moi la nouvelle que Francis Berthelot avait écrite pour (Pro)Créations, j'avais demandé à recevoir en échange un exemplaire de la revue. Je l'attends toujours.

 

Sinon, je reviens au forum du Bélial pour saluer la réaction de Don Lo qui dit (des tas de choses intéressantes dont  :) Et donc je vais faire la seule chose en mon faible pouvoir : ne pas acheter et ne pas lire ce Bifrost. Tant pis pour les nouvelles et les articles qui le méritaient. Mes excuses aux auteurs. Ça me paraît bien préférable au refus en bloc de lire les productions du Bélial (comme je l'ai lu sur le forum d'ActuSF), car il y a chez cet éditeur des petites merveilles, des auteurs fabuleux comme Joëlle Wintrebert, Francis Berthelot, Michel Pagel, Claude Ecken (dommage, il paraît que son article sur la SF dans ce numéro de Bifrost pollué par les razzies est excellent) (en fait son livre est réédité en poche) ou Jean-Pierre Andrevon (ah, c'est donc ça, le Bélial était furieux qu'Andrevon ne puisse assurer la promotion de son roman ?)

 

Je saluerai aussi la réaction de Casse-bonbon qui, après avoir lu l'article, est revenue sur ses conseils de zénitude. Même si je crois qu'elle a allumé le feu aux poudres avec sa diatribe contre Métier éditeur le jour où nous (ce blog, les lecteurs, les gens du métier, les passionnés...) étions en deuil.

edit : Tout compte fait, non, je ne salue pas, parce qu'un coup elle dit qu'il faut être zen et tendre l'autre joue, un coup elle s'insurge contre les mensonges et insultes de l'article, et après elle dit que j'aurais dû faire preuve de plus de mesure, et pour finir avoue que, tout compte fait, elle n'a pas lu l'article (et conclut que les autres l'ont lu en diagonale...)

 

Et, hors-forum, j'applaudis au billet de Cibylline.

 

Mais quand, sur le forum d'ActuSF, je lis « ce qui ressort de cet article, c'est la haine incroyable qui semble régner dans le milieu, et qui dégoute, purement et simplement », j'ai carrément les boules parce que ce que dit Cachou est tout à fait compréhensible, et juste et faux à la fois. Juste, parce que la haine dégouline, et faux, parce qu'elle ne règne pas dans le milieu, mais émarge de quelques-uns, seulement. D'autres pratiquent au contraire la solidarité (Métier éditeur en est un parfait exemple) et ce, malgré la concurrence. Dur, dur  ? Oui, mais pas impossible. Et tellement plus enrichissant. (Et, non, Cachou, tu n'aurais pas dû garder ton indignation pour toi, elle est saine et normale, tu n'as pas à t'auto-censurer !)

 

Pour en revenir aux Razzies. J'ai exprimé plusieurs fois mon désir d'en recevoir un, et je croyais avoir mes chances avec Les Enfants de Svetambre. À la place, les injures faites à Il était 7 fois me paraissent tellement hors de propos et même pas drôles...

J'ai aussi dit, apprenant que j'étais supposée avoir servi mes excréments à ma fille, que je regrettais vivement qu'il n'y ait pas de cérémonie de remise des prix, que je m'y serais volontiers rendue avec mes bottes en caoutchouc et mon seau de crottin. Lorsque certains ont parlé d'entartage, j'ai dit que tel était le but du seau de crottin. Ça n'était pas tout à fait exact. Il m'aurait surtout servi à assainir l'atmosphère.

 

Parce que vraiment, tout ça pue.

 

Enfin, ça a tellement peu d'importance... j'ai entendu une nouvelle qui me réjouit  : les Tunisiens se rendent en nombre dans les librairies pour trouver tous les livres jusque-là interdits... La littérature (peu importe son étiquette de genre, sous-genre, etc.) aurait-elle encore de beaux jours devant elle ?

 

 

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Published by Lucie Chenu - dans Livres - édition