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  • : Les Humeurs de Svetambre
  • : Je n'aime pas les étiquettes, les catégories, les petites cases... je m'y sens à l'étroit. J'ai l'intention de parler de bien des choses, ici ! De mes livres ou de ceux que j'ai lus, de mon travail ou de ma famille, de ce qui me fait hurler et de ce qui me fait jouir de la vie...
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  • Lucie Chenu
  • Je suis un être humain, Yeah ! et comme tout être humain, je possède trop de facettes, trop d'identités, pour les définir en moins de 250 caractères. Vous devez donc lire mes articles !
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31 octobre 2011 1 31 /10 /octobre /2011 14:52

 

 

Le Petit Jardin des fées                                           http://www.lelitteraire.com/IMG/fees%20couv.jpg

Anne Duguël, alias Gudule

éditions [Mic_Mac]

collection Prétexte

illustration de couverture : Xavier Collette

octobre 2010, 176 pages, 17 €

 

 

Le petit jardin des fées est un roman pour adultes, c'est pourquoi Gudule l'a signé Anne Duguël, son nom de plume réservé aux adultes (alors que Gudule, son nom de plume tout court, a servi surtout pour ses ouvrages jeunesse, mais pas que, la preuve, les deux omnibus publiés chez Bragelonne : Le Club des petites filles mortes et Les filles mortes se ramassent au scalpel) (en fait, Gudule explique la raison de ce nouveau changement de pseudonyme dans une interview récente). Il est paru aux éditions [Mic_MaC], dans la collection Prétexte, une collection pour adultes, donc, chez cet éditeur spécialisé pour la jeunesse. C'est un roman d'horreur, mais pas de fantastique. Est-ce pour cela, je ne sais pas, mais toujours est-il qu'on a peu parlé de ce livre, comparé à d'autres titres de Gudule. Ce qui est bien dommage, à mon humble avis, parce que ce bouquin est excellent, et que je me suis régalée à sa lecture. Un seul regret pour ce livre superbement illustré par Xavier Collette : qu'on en parle si peu. À vrai dire, même le site de l'éditeur n'est pas à jour, et c'est sur Le Littéraire que j'ai trouvé l'illustration de couverture. (Attention, je trouve que la chronique de Serge Perraud, très intéressante au demeurant, dévoile un peu trop l'histoire, donc à vous de voir si vous avez envie de la lire avant de lire le roman. Je trouve aussi que dans la réserve qu'il émet, S. Perraud confond l'auteur et son personnage…)

 

Vanille et Fleur sont en vacances chez leur mamie, Claudine Duchemin, à Pastourou, un village du Tarn. Elles y jouent tous les jours avec Nina, la fille du maire et de la tenancière du bar-tabac. Les trois fillettes vont dans le « jardin aux simples » et écoutent de la musique, et dansent, dans l'espoir d'attirer les fées. Elles vont effectivement attirer quelque chose, mais pas ce qu'elles espéraient.

Dès le début, on sait que quelque chose s'est passé, quelque chose de dramatique qui concerne Fleur. Mais on ne sait pas quoi, on devine, peu à peu. On comprend à demi-mot, on se trompe peut-être, et on découvre bien plus que ce à quoi l'on s'attendait.

L'histoire est racontée tour à tour par une dizaine de personnages, neuf, très exactement, qui jouent un rôle plus ou moins important. Il y a Vanille, la grande sœur de Fleur, Nina, et Claudine, dont on découvre peu à peu le passé douloureux. Et puis les parents de Nina, et d'autres encore. Et tous ces gens nous parlent comme si on était au courant, comme si l'on savait ce qu'il s'était passé, alors qu'on n'en sait rien. Et ils ont tous une façon bien à eux de s'exprimer. Les fillettes parlent comme des enfants, elles ont des préoccupations d'enfants, un langage d'enfants – plus ou moins, car elles n'ont pas le même âge, et puis l'une est parisienne et parle de sa sœur, l'autre est de Pastourou et parle de son village. Les adultes n'ont pas du tout les mêmes préoccupations, d'ailleurs, ils ont tous des choses différentes en tête, certains sont heureux de vivre, d'autres ressassent de vieilles rancœurs, voire de grands malheurs. Il est question de fenêtres bouchées, de chasseurs bourrés, et puis de lourds secrets, à peine murmurés.

Au début, j'ai cru que je n'allais pas m'habituer à ces changements de narrateurs si fréquents – chaque « témoignage » dure entre une et trois pages – et puis, bien sûr, je m'y suis fait très vite. Bien sûr, parce que Gudule – pardon, Anne Duguël – a un immense talent, alors on y croit, on rentre très vite dans l'histoire et dans les sentiments, les émotions des habitants de Pastourou. Et aussi parce que les narrateurs étant présentés en annexe, en tête de roman, il est aisé de s'y reporter, le temps de faire connaissance. (À la fin du livre, c'est la généalogie des principaux personnages qui est indiquée, et c'est une autre très bonne idée.)

Et petit à petit, ces narrateurs qui, en apparence, ne parlent pas de la même chose, ne racontent pas la même histoire, dessinent une image, à la façon d'un puzzle, ou plutôt d'une toile, par petites touches impressionnistes. Il y a des moments de chagrin, de la peur, mais aussi des rires et des rêves. Il est question d'amour dans ce livre, et de haine aussi. De souffrance et de bonheur. D'erreurs, oh oui ! De ces choses très simples, très quotidiennes, qui construisent un destin, une personnalité.

Tous ces gens ont des tons qui sonnent terriblement juste. Ce n'est pas un style littéraire que nous offre Gudule, mais neuf. Neufs voix qu'on a l'impression d'entendre parler avec des accents du Sud, de Paris ou du Wisconsin, neuf paroles exprimées avec retenue, humour ou colère, neuf personnes dont on devine, par la façon qu'elles ont de s'exprimer, ce qu'elles ont vécu, les voyages, les expériences, les épreuves qui les ont forgées. Parce qu'en fait, plutôt que de raconter ce qui est arrivé à Fleur, chacun dit ce qu'il a vécu, récemment et autrefois.

C'est du grand art, et c'est bon !

 

  edit : une précision que j'ai oublié de donner. Ce bouquin est un roman d'horreur, mais il n'est pas malsain. Il ne m'a pas mise mal à l'aise comme certains textes. Et pour ça aussi, chapeau Gudule !

 

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Published by Lucie Chenu - dans Les lectures de Svetambre